BM 171-3 2013

Les peintures murales de Saint-André-des-Eaux (Côtes-d’Armor) et la nef de l’abbatiale de Saint-Benoît-sur-Loire

Après deux importants articles sur les peintures murales de Saint-André-des-Eaux (Côtes-d’Armor) et sur la nef de l’abbatiale de Saint-Benoit-sur-Loire, ce numéro propose une texte de réflexion sur l’histoire de la restauration avant les rubriques habituelles : actualités, chronique et bibliographie.

Articles
Les premières peintures murales de l’église de Saint-André-des-Eaux (Côtes-d’Armor) : analyse archéologique d’un ensemble ornemental roman, par Mathias Dupuis
Création artistique et spiritualité à Saint-Benoît-sur-Loire. La nef de l’abbatiale (vers 1160-1207), par Éliane Vergnolle

Mélanges
Travaux récents sur l’histoire de la restauration. Notes de lecture, par Patrick Ponsot

Actualité
Maine-et-Loire. Angers. Premiers résultats du suivi archéologique des travaux de restauration du front sud du château (XIIIe siècle) (Céline Chauveau, Emmanuel Litoux, Daniel Prigent)

Maine-et-Loire. Saumur. Restauration de la grande vis du château (Emmanuel Litoux et Jacqueline Mongellaz)

Seine-Maritime. Rouen. Nouvelle lecture de la « salle romane » de l’archevêché (Éric Follain et Dominique Pitte)

Chronique
Tessin carolingien. Le site haut-médiéval de Saint-Fabien-Saint-Sébastien d’Ascona (canton du Tessin) (Pascale Chevalier)
Architecture religieuse en France et en Allemagne. XIIIe-XVe siècle. La Sainte Chapelle de la France à l’Allemagne ? Une nouvelle exégèse (Marc Carel Schurr). — Signalement : un monument majeur de la sculpture française vers 1300 en Aquitaine (Dominique Hervier). — Signalement : Saint-Gatien de Tours (Indre-et-Loire) : découvertes lapidaires à l’occasion du chantier de restauration (Dominique Hervier)
Iconographie. XIIe-XVIe siècle. Saint-Amand-de-Boixe : vers une nouvelle lecture du décor sculpté du bras nord du transept (Yves Christe). — L’ours et saint Ursin : récupération chrétienne des pratiques païennes en Berry (Jacqueline Leclercq-Marx). — Décryptage d’un ensemble peint du XIIIe siècle au monastère de Saint-Macaire (Gironde) (Daniel Russo). — Le vitrail d’Ervy-le-Châtel (Aube) : une interprétation nouvelle (Jean Balsamo)
Architecture castrale et savoyarde. XIIe-XVIe siècle. La maison haute dans l’ancien diocèse de Genève (Jean Mesqui). — Le château de Clermont (Haute-Savoie) (Jean Mesqui)
Culture chrétienne médiévale : les cinq sens. Une étude pluridisciplinaire (Audrey Ségard) br/> Renaissance. Invention architecturale. Les ordres sans règles de la Renaissance italienne (Jean Guillaume)
Vitrail. XXe siècle. Un maître verrier à redécouvrir en Picardie (Jean-François Luneau)
Histoire de l’histoire de l’art. XIXe-XXe siècle. Johann Rudolf Rahn, fondateur de l’histoire de l’art suisse (Georg Germann)

Bibliographie

Architecture. Rosario Lazcano Martinez de Morentín, (dir.), Santa María de Ujué (Philippe Araguas). — Delphine Hanquiez (éd.), Regards sur les dépôts lapidaires de la France du Nord (Philippe Araguas). — Jean-Pierre Laporte (dir.), Le voyage à Constantinople du chevalier de Clairac. Archéologie et architecture en Méditerranée orientale (1724-1727) (Patrick Ponsot). — Jean-Michel Leniaud, De Napoléon à la République. La basilique royale de Saint-Denis (Patrick Ponsot). — Béatrice Vivien, L’Empereur et l’ouvrière. L’asile impérial du Vésinet (Françoise Hamon)

Architectes. Alexandre Cojannot, Louis Le Vau et les nouvelles ambitions de l’architecture française, 1612-1654 (Jean-François Cabestan). — Corinne Bélier, Barry Bergdoll et Marc Le Cœur (dir.), Labrouste, (1801-1875), architecte. La structure mise en lumière (Françoise Hamon)

Ornements. Evelyne Thomas, Vocabulaire illustré de l’ornement par le décor de l’architecture et des autres arts (Catherine Titeux)

Art byzantin. Svetlana Tomeković, Les saints ermites et moines dans la peinture murale byzantine (Catherine Vanderheyde)

Iconographie. Sherry C. M. Lindquist (éd.), The Meanings of Nudity in Medieval Art (Christian Heck)

Résumés analytiques

Les premières peintures murales de l’église de Saint-André-des-Eaux (Côtes-d’Armor) : analyse archéologique d’un ensemble ornemental roman, par Mathias Dupuis
Les ruines de l’ancienne église paroissiale de Saint-André-des-Eaux (Côtes-d’Armor), située à une dizaine de kilomètres au sud-est de Dinan, conservent encore les traces des premières peintures murales de l’édifice dont la construction remonte au cours du XIe siècle. Une campagne d’étude archéologique des élévations et de sondages, conduite entre 2007 et 2008, avait pour objectif d’apporter de nouveaux éléments à la compréhension de l’édifice et de ses décors. Les résultats de ces recherches, enrichies par la découverte de plusieurs centaines de fragments d’enduits peints lors de la fouille et par l’existence de relevés et de photographies réalisés au début du XXe siècle pour le musée des Monuments français, permettent aujourd’hui de proposer une restitution de ces décors peints et de détailler leur mise en œuvre. La construction géométrique et polychrome de ces peintures ornementales, tout comme la technique mixte utilisée pour leur réalisation, invitent à les rattacher à une tradition picturale romane, voire préromane, que l’on retrouve dans plusieurs églises caractéristiques du « premier art roman », dont les manifestations restent particulièrement méconnues en Bretagne. Certaines analogies avec le répertoire décoratif monumental de la seconde moitié du XIe siècle interrogent sur les parallèles entre la peinture murale et les autres techniques de la décoration murale romane (appareillages, sculpture, modénature).

Création artistique et spiritualité à Saint-Benoît-sur-Loire. La nef de l’abbatiale (vers 1160-1207), par Éliane Vergnolle
À la différence de la tour-porche du début du XIe siècle et du chevet consacré en 1107, la nef de l’abbatiale de Saint-Benoît-sur-Loire a peu retenu l’attention des chercheurs, sans doute en raison de la simplicité de son architecture. Elle a toujours été datée du milieu du XIIe siècle et considérée comme l’un des premiers exemples d’architecture gothique de l’Orléanais. L’étude de la construction, du décor sculpté et de la modénature conduit cependant à repousser la date de mise en chantier aux environs de 1160. Les travaux, d’abord menés assez activement d’est en ouest au niveau des grandes arcades, devaient ensuite être interrompus à deux reprises dans les parties hautes du vaisseau central avec, à chaque fois, une mise au goût du jour se traduisant par un agrandissement des fenêtres. L’ensemble était achevé pour la translation des reliques de saint Benoît à la croisée du transept, en 1207. L’examen archéologique montre que le portail à statues-colonnes qui s’ouvre dans la travée médiane du bas-côté nord appartient à la même phase de chantier que celle-ci, dans les années 1170-1180. On peut donc mieux apprécier désormais la place de cette œuvre magistrale dans l’histoire des débuts de la sculpture gothique, tant du point de vue de l’iconographie, avec l’émergence d’une nouvelle sensibilité, que du style, fortement inspiré par l’Antiquité.

English summaries

The first wall paintings in the church of Saint-André-des-Eaux (Côtes-d’Armor) : an archaeological analysis of a Romanesque ornamental decoration by Mathias Dupuis
The ruins of the ancient parish church of Saint-André-des-Eaux (Côtes-d’Armor), situated ten kilometres southeast of Dinan, still preserve traces of the eleventh-century building’s earliest wall paintings. An archaeological study of the elevations and soundings made in 2007-2008 led to new understanding of the building and its decoration. The results, supplemented by the discovery of hundreds of plastered fragments and by twentieth-century photographs made for the Musée des Monuments français, have been used to reconstruct the painted decoration and its layout. The geometric polychrome construction of these wall paintings and the mixed technique that was used tends to link them with Romanesque or even pre-Romanesque pictorial tradition that is found in several churches that characterise the “first Romanesque”, which have often gone unrecognized in Brittany. Certain analogies with the monumental decorative repertory of the second half of the eleventh century suggest possible parallels with other techniques of wall decoration (patterned stonework, sculpture, ornamental mouldings).

Artistic creation and spirituality at Saint-Benoît-sur-Loire. The nave of the abbey church (ca. 1160-1207) by Eliane Vergnolle
Unlike the tower-porch from the beginning of the eleventh century and the chevet, consecrated in 1107, the nave of the abbey of Saint-Benoît-sur-Loire has received little attention, probably because of the simplicity of its architecture. Its inception has always been dated from the mid thirteenth century and considered as one of the first examples of Gothic architecture in the Orléanais. A study of its construction, sculpture, and ornamented mouldings push the beginnings of the worksite forward, to around 1160. Work advanced rather rapidly at first, from east to west, to the level of the great arcades. Progress was then interrupted twice in the upper parts of the nave, each time for an enlargement of the windows, in line with contemporary trends. The building was finished when the relics of St Benedict were translated to the transept crossing in 1207. Archaeological examination shows that the portal with statue columns that opens onto the middle bay of the north side aisle belongs to the same phase of work as the bay itself, in the years 1170-1180. Henceforth this masterpiece can take its rightful place in the history of the beginnings of Gothic sculpture, both from the standpoint of iconography, with the emergence of a new sensitivity, and from that of style, strongly influenced by Antiquity.

Deutsche Zusammenfassung

Die ersten Wandmalereien der Kirche Saint-André-des-Eaux (Departement Côtes-d’Armor). Archäologische Analyse einer romanischen Schmuckausstattung, von Mathias Dupuis
. Die Ruine der ungefähr zehn Kilometer südlich von Dinan gelegenen, ehemaligen Pfarrkirche Saint-André-des-Eaux, birgt noch Spuren der ersten Wandmalereien des im Laufe des 11. Jhs. errichteten Bauwerks .Zwischen 2007 und 2008 wurden archäologische Studien am Aufgehenden sowie Bodenuntersuchungen durchgeführt, mit dem Ziel, das Bauwerk und seine Schmuckausstattung mit Hilfe neuer Erkenntnisse besser zu verstehen. Hunderte bemalter Putzfragmente, die im Laufe der Bodenuntersuchungen entdeckt wurden, sowie Bauaufnahmen und Fotografien, die Anfang des 20. Jhs. für das Musée des Monuments français angefertigt wurden, bereichern noch die Forschungsergebnisse und versetzen uns heute in die Lage, die Malereien zu restituieren und ihre Ausführung detailliert zu beschreiben. Die geometrische und farbliche Gestaltung der Malereien sowie die die dabei eingesetzte Mischtechnik verweisen auf eine romanische, vielleicht sogar vorromanische Tradition der Malkunst, die sich in mehreren Kirchen des sogenannten „premier art roman“ beobachten lässt, die in der Bretagne jedoch weithin verkannt wird. Gewisse Übereistimmungen mit einer Reihe großer Architekturdekore der zweiten Hälfte des 11. Jhs. werfen Fragen nach Parallelen zwischen Wandmalerei und anderen Schmucktechniken der romanischen Wand auf (Mauerwerk, Skulptur, Profilgestaltung).

Kunstschaffen und Spiritualität in Saint-Benoît-sur-Loire. Das Schiff der Abteikirche (um 1160-1207), von Eliane Vergnolle.
Im Gegensatz zum Westturm vom Anfang des 11. Jhs. und dem 1107 geweihten Chorhaupt hat die Forschung dem Schiff der Abteikirche nur wenig Beachtung geschenkt, zweifellos aufgrund seiner einfachen Architektur. Das Hauptschiff wurde allgemein in die Mitte des 12. Jhs. datiert und als eines der ersten Beispiele gotischer Architektur in der Region um Orléans angesehen. Eine Analyse der Baustruktur, des Bauschmucks und der Profile veranlasst uns jedoch, den Beginn der Bauarbeiten später anzusetzen, und zwar um das Jahr 1160. Die Bauarbeiten an den großen, von Osten nach Westen errichteten Arkaden gingen zunächst zügig voran, wurden dann aber zweimal im oberen Bereich des Hauptschiffes unterbrochen, wobei jedes Mal dem Zeitgeschmack Rechnung getragen wurde, was insbesondere durch eine Vergrößerung der Fenster zum Ausdruck kam. Die Bauarbeiten waren zur Überführung der Reliquien des heiligen Benedikt in die Vierung im Jahre 1207 abgeschlossen. Eine archäologische Untersuchung zeigt, dass das Säulenfigurenportal im mittleren Joch des nördlichen Seitenschiffes gleichzeitig mit diesem errichtet wurde, und zwar in den Jahren 1170-1180. Es ist nunmehr also möglich, die Stellung dieses Meisterwerkes aus den Anfängen der gotischen Skulpturengeschichte besser zu bewerten, sowohl vom Standpunkt der Ikonographie aus betrachtet -, mit dem Auftreten einer neuen Sensibilität -, als auch von jenem des Stils, der stark von der Antike inspiriert ist.

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