BM 167-2 2009

Varia

VARIA

ARTICLES

- L’église Notre-Dame des Dominicains à Louvain (1251-1276). Le mémorial d’Henri III, duc de Brabant, et d’Alix de Bourgogne, par Thomas Coomans et Anna Bergmans
- L’hôtel des seigneurs d’Harcourt à Paris. Une résidence aristocratique de la fin du XIIIe siècle, par Pierre Garrigou Grandchamp

MÉLANGES

Retour à Maulnes. Deux décennies de recherches sur un château exceptionnel, par Krista De Jonge

ACTUALITÉ

- Cher. Bourges. Découverte de fragments en provenance du portail nord de la cathédrale Saint-Étienne (Patrick Ponsot)
- Gers. Saint-Pierre de Tasque. Découverte de la tête du Christ du tympan du portail occidental (Laurence Cabrero-Ravel)
- Indre-et-Loire. Lignières-de-Touraine. Restauration d’un important ensemble de peintures murales romanes (Pierre Garrigou Grandchamp).
- Yonne. Noyers-sur-Serein. Une enceinte « philippienne » de la fin du XIIe siècle ? (Fabrice Cayot)
- Belgique. Chronique d’archéologie en Wallonie, 2008 (Pierre Garrigou Grandchamp)

CHRONIQUE

- Castellologie. Le château de Domeyrat (Jean Mesqui). — À propos de l’architecture castrale plantagenêt en Normandie et des châteaux du Vexin Normand (Jean Mesqui)
- Architecture canoniale et épiscopale. Autour des ensembles cathédraux de la péninsule ibérique (Pierre Garrigou Granchamp)
- Architecture religieuse. La chapelle de Moussy en Haute-Savoie du XIIe au XVe siècle (Dominique Hervier)
- Épigraphie. Écriture épigraphique au Moyen Âge (Dominique Hervier). — Les Inscriptions latines de la galerie des glaces à Versailles : « une épigraphie de la gloire » (Dominique Hervier)
- Architecture classique. Le cardinal de Richelieu et l’architecture (Nicolas Courtin)
- Sculpture et décor au XIXe siècle. Une relecture des Apôtres de la flèche de Notre-Dame de Paris (Jannie Meyer). — Un décor néogothique précoce aux environs de Bâle (Dominique Hervier)

BIBLIOGRAPHIE

- Art de la Renaissance et de l’époque classique. Bertrand Jestaz, L’art de la Renaissance (Jean Guillaume). — Jean-Pierre Babelon (dir.), Primatice à Chaalis (Magali Bélime-Droguet). — Sabine Frommel et Gerhard Wolf (dir.), Il mecenatismo di Caterina de’ Medici. Poesia, feste, musica, pittura, scultura, architettura… (Yves Pauwels). — Pierre Pinon, Pierre-Adrien Pâris (1745-1819), architecte, et les monuments antiques de Rome et de la Campanie (Pierre Gros).—Les Édifices antiques de Rome dessinés et mesurés très exactement par Antoine Desgodets, architecte (Bertrand Jestaz). — Philippe Béchu et Christian Taillard, Les Hôtels de Soubise et de Rohan-Strasbourg. Marchés de construction et de décor (Jörg Garms)

RÉSUMÉS ANALYTIQUES

L’église Notre-Dame des Dominicains à Louvain (1251-1276). Le mémorial d’Henri III, duc de Brabant, et d’Alix de Bourgogne, par Thomas Coomans et Anna Bergmans

L’église des Dominicains à Louvain (Leuven, Belgique), le plus ancien édifice gothique de la capitale du Brabant, fut bâtie dans le courant de la seconde moitié du XIIIe siècle comme église funéraire d’Henri III, duc de Brabant, et de son épouse Alix de Bourgogne. Grâce à l’appui de la famille ducale, les Dominicains (Frères Prêcheurs) réussirent à construire un monastère important dans le coeur de la ville, sur le site de l’ancienne résidence ducale. Comme la plupart des couvents dominicains, celui de Louvain comprenait une bibliothèque et un studium qui devint un studium generale suite à la fondation de l’université de Louvain en 1425. Après la suppression de la communauté en 1796, les bâtiments monastiques furent détruits et l’église utilisée comme église paroissiale. Désacralisée depuis peu, l’église est désormais utilisée par la ville pour des événements culturels. Le présent article retrace la fondation et l’installation des Dominicains à Louvain ainsi que les deux principales phases de construction de l’église (vers 1251-1276 et première moitié du XIVe siècle). Le parti architectural du choeur, une véritable châsse gothique, fait écho à la Sainte-Chapelle de Paris et a une signification funéraire et dynastique. Toutefois, l’église est conforme à l’esprit de l’architecture mendiante : simplification des remplages et des profils, murs non articulés, sculpture architectonique confinée aux clés de voûtes et aux culots, absence de tour. Malgré les transformations intérieures survenues au XVIIIe siècle, un des caractères les plus étonnants de l’édifice est le contraste entre la moitié orientale, pourvue d’une abside polygonale 7/12 et de voûtes d’ogives contrebutées par des arcs-boutants, et la partie occidentale, couverte d’un berceau en bois et éclairée par des ouvertures modestes. La datation livrée par l’analyse dendrochronologique de la moitié orientale de la charpente (1251-1265) s’accorde parfaitement avec la date du décès d’Henri III et de son inhumation dans le choeur, en construction en 1261, ainsi qu’avec la consécration de l’église par Albert le Grand en 1276. Les ducs de Brabant aménagèrent une chapelle dans la première travée du bas-côté septentrional, séparée du sanctuaire et du choeur des frères par un mur. Le tombeau d’Henri III et d’Alice († 1274) ne se trouvait pas dans la chapelle mais était érigé contre le mur de séparation, du côté du choeur. Une peinture sur le mur de séparation et deux verrières dans la chapelle ducale commémoraient les fondateurs et leur famille. Grâce à plusieurs sources iconographiques et à des descriptions du début du XVIIe siècle, le présent article essaie de reconstituer la configuration et la signification de ces composantes qui ont malheureusement presque totalement disparu aux XVIIe et XVIIIe siècles. Le mausolée était une tombe dynastique qui, fondée sur des modèles français, visait à légitimer la maison de Brabant dans le duché ainsi que la succession des jeunes héritiers. Les deux verrières sont datables du dernier quart du XIIIe siècle. Elles glorifient les deux liens dynastiques avec la maison royale de France : Marie de Brabant, reine de France de 1274 à 1285, et Marguerite de France, duchesse de Brabant de 1270 à 1271. D’après les caractéristiques stylistiques et les costumes, la peinture murale est datable des années 1370-1380. La triple représentation des fondateurs et des membres de la famille ducale assurait la survie de leur memoria. En réunissant le passé, le présent et l’avenir, ce programme constituait une véritable « mise en scène de la mémoire ».

L’hôtel des seigneurs d’Harcourt à Paris, une résidence aristocratique de la fin du XIIIe siècle, par Pierre Garrigou Grandchamp

Les vestiges de l’hôtel des seigneurs de Harcourt, situé immédiatement au sud du Palais des Thermes, furent découverts en 1852 à l’occasion de la percée de la rue des Écoles. Relevés avec soin par Théodore Vacquer, ils furent impitoyablement détruits dans le courant de la même année. Les planches que celui-ci avait préparées pour la Statistique monumentale de Paris,d’Alexandre Lenoir restèrent inédites et l’édifice sombra dans l’oubli dès la fin du XIXe siècle. Une étude attentive des minutes des relevés et des plans les plus anciens de Paris, puis un réexamen des sources ont autorisé la restitution du plan de masse de l’hôtel, une évocation détaillée de son principal corps de bâtiment, renfermant la grande salle et une proposition de datation de celle-ci après 1256 et avant 1269, fondée sur l’identification des armoiries. La confrontation entre ces données et l’étude formelle des réseaux des grandes fenêtres conduit à souligner la modernité d’une oeuvre dont les seuls points de comparaison contemporains se trouvent dans l’oeuvre de Pierre de Montreuil. L’hôtel d’Harcourt est à ce jour la seule résidence d’un Grand de l’époque de Saint Louis ainsi restituable.

ENGLISH SUMMARIES
(Traduction Patricia Stirnemann)

The Lady Church of the Dominican Friary of Louvain (1251-1276). The memorial of Henry III, duke of Brabant, and Alix of Burgundy, by Thomas Coomans and Anna Bergmans

The Dominican church of Louvain (Leuven, Belgium), the oldest gothic building in the capital of Brabant, was built in the second half of the thirteenth century as the burial church of Henry III duke of Brabant and his wife duchess Alice of Burgundy. Thanks to the support of the ducal family, the Dominicans (Friar Preachers or Blackfriars) succeeded in building an important monastery in the heart of the city, on the site of the former ducal residence. Like all the friaries, that of Louvain included a library and a studium that became a studium generale as a consequence of the foundation of the university of Louvain in 1425. After the dissolution of the community in 1796, the monastic buildings were destroyed and the church used as a parish church. Today the church is desacralised and used by the city for cultural events. This article relates the foundation and installation process of the Dominicans in Louvain, and the two main building phases of the church (around 1251-1276 and first half of the fourteenth century). The architectural concept of the choir, which is a pure gothic shrine, is a reception of the Sainte-Chapelle of Paris and has both a funerary and a dynastic meaning. Nevertheless, the church is conform with the spirit of themendicant architecture : the traceries and profiles are simplified, the walls are not articulated, the architectonic sculpture is reduced to the bosses and the corbels, there is no tower. Despite the refurbishing of the church during the eighteenth century, one of the most amazing characteristics of the church is the contrast between the eastern part with a 7/12 polygonal apse and stone vaults stressed by flying buttresses, and the modest western part covered with a wooden vault and lightened by smaller windows. The tree-ring dating of the eastern half of the church (1251-1265) synchronises perfectly with the date of duke Henry’s death and burial in the church under construction in 1261, and the dedication of the church by Albert the Great in 1276. The dukes of Brabant had their own chapel in the northern aisle, separated with a wall from the sanctuary and the friars’ choir. The tomb of Henry III and Alice († 1274) was not in the chapel, but was erected against that separation wall, at the side of the sanctuary. A painting on the wall and two stained-glass windows in the ducal chapel commemorated the founders and their family. Thanks to several richly illustrated sources and descriptions dating from the early seventeenth century, this article aims to elucidate the importance and meaning of these elements, which almost completely disappeared over the course of the seventeenth and eighteenth centuries. The mausoleum was a tomb of kinship, which was based on French models and intended to legitimate the house of Brabant in the duchy as well as the succession of the still young heirs. The two stained-glass windows are datable from the last quarter of the thirteenth century. They celebrated the two dynastic connections with the French kingdom : Mary of Brabant, queen of France from 1274 to 1285, and Margaret of France, duchess of Brabant from 1270 to 1271. According stylistic characteristics and the costumes, the wall painting is to be dated from the years 1370-1380. The triple representation of the founders and members of the ducal family ensured that their memoria would live on in the church after them. Past, present and future were united in what might be termed a ‘staging’ of memory.

The residence of the lords of Harcourt in Paris, an aristocratic dwelling at the end of the thirteenth century, by Pierre Garrigou Grandchamp

The vestiges of the residence of the lords of Harcourt, located immediately south of the Palais des Thermes, were discovered in 1852 when the rue des Écoles was built. Carefully documented by Théodore Vacquer, the remains were ruthlessly destroyed during the same year. The plates that Vacquer had prepared for Alexander Lenoir’s La statistique monumentale de Paris remained unpublished and the edifice was forgotten by the end of the nineteenth century. A study of the excavation account and the oldest plans of Paris, followed by a re-examination of the sources, made it possible to reconstruct the mansion’s exact emplacement, to provide a detailed evocation of the main building, which included the great hall, and propose a dating for the latter of 1256 to 1269, based on the identification of the heraldry. The confrontation of this evidence with a morphological study of large windows underlines the modernity of the building, for which the only contemporary points of comparison can be found in the work of Pierre de Montreuil. To this day, the Harcourt mansion is the only aristocratic residence that can be reconstructed from the time of Saint Louis.

DEUTSCHE ZUSAMMENFASSUNG
(Traduction Andreas Curtius)

Die Dominikanerkirche Unserer Lieben Frau in Löwen, 1251–1276. Denkmal für Herzog Heinrich III. von Brabant und Alix von Burgund, von Thomas Coomans und Anna Bergmans

Die Dominikanerkirche in Löwen (frz. Louvain, ndl. Leuven, Belgien), das älteste gotische Bauwerk in der Hauptstadt Brabants, wurde im Laufe der zweiten Hälfte des 13. Jahrhunderts als Grablege für Herzog Heinrich III. von Brabant und seine Gattin, Alix von Burgund, erbaut. Dank der Unterstützung der herzoglichen Familie gelang es den Dominikanern (Predigern), im Herzen der Stadt ein bedeutendes Kloster zu errichten, an der Stelle der ehemaligen Herzogsresidenz. Wie die meisten Dominikanerklöster besaß das von Löwen eine Bibliothek und ein studium, das durch die Gründung der Universität Löwen 1425 zum studium generale wurde. Nach der Aufhebung der Gemeinschaft 1796 wurden die Klostergebäude zerstört und die Kirche al s Pfarrkirche benutzt. Seit kurzem profaniert, dient die Kirche heute der Stadt für kulturelle Veranstaltungen. Der vorliegende Artikel schildert die Gründung und Niederlassung der Dominikaner in Löwen sowie die beiden Hauptbauphasen der Kirche (um 1251–1276 und in der ersten Hälfte des 14. Jahrhunderts). Die architektonische Chorlösung, ein veritabler gotischer Schrein, greift die Sainte-Chapelle von Paris auf und hat eine Begräbnis- und eine dynastische Bedeutung. Dennoch geht die Kirche mit dem Geist der Bettelordensarchitektur konform : Vereinfachung der Maßwerke und Profile, ungegliederte Wände, Beschränkung der Bauzier auf Schlusssteine und Konsolen, Fehlen eines Turmes. Trotz der im 18. Jahrhundert vorgenommenen Veränderungen im Inneren bleibt das erstaunlichste Kennzeichen des Bauwerks der Kontrast zwischen der Osthälfte mit seiner polygonalen 7/12-Apsis und den von Strebebögen gestützten Rippengewölben, und der Westhälfte mit hölzernem Tonnengewölbe und bescheidenen Fensteröffnungen. Die dendrochronologische Datierung der Osthälfte des Dachstuhles (1251–1265) stimmt hervorragend überein mit dem Todesdatum Heinrichs III. und seinem Begräbnis in dem 1261 im Bau befindlichen Chor, sowie mit der Weihe der Kirche durch Albertus Magnus im Jahre 1276. Die Herzöge von Brabant richteten im ersten Joch des Nordseitenschiffs eine Kapelle ein, die vom Altarraum und dem Mönchschor durch eine Mauer abgetrennt wurde. Das Grab Heinrichs III. und der Alix († 1274) befand sich nicht im Inneren der Kapelle, sondern wurde auf der Seite des Chores an die Trennmauer angebaut. Eine Wandmalerei an dieser Trennwand und zwei Glasfenster in der Herzogskapelle erinnerten an die Stifter und ihre Familie. Dank mehrerer Bildquellen und Beschreibungen vom Beginn des 17. Jahrhunderts versucht dieser Artikel, die nordnung und Bedeutung dieser Komponenten zu rekonstruieren, die leider im 17. und 18. Jahrhundert fast vollständig verschwunden sind. Die Grabkapelle war eine dynastische Grablege, die – auf französische Vorbilder gestützt – darauf abzielte, die Herrschaft des Hauses Brabant und die Nachfolge der noch jungen Erben im Herzogtum zu legitimieren. Die beiden Glasfenster lassen sich ins letzte Viertel des 13. Jahrhunderts datieren. Sie glorifizieren die beiden dynastischen Verbindungen mit dem französischen Königshaus : Maria von Brabant, von 1274 bis 1285, Königin von Frankreich, und Margarethe von Frankreich, von 1270 bis 1271 Herzogin von Brabant. Nach den stilistischen Merkmalen und den Kostümen lässt sich die Wandmalerei in die Jahre 1370–1380 datieren. Die dreifache Darstellung der Stifter und der Mitglieder der Herzogsfamilie sicherte die Fortdauer ihrer memoria. Im Zusammenfügen von Vergangenheit, Gegenwart und Zukunft stellte dieses Programm eine sinnfällige Inszenierung des Gedenkens“ dar.

Das Stadtpalais der Herren von Harcourt in Paris, ein Adelssitz des späten 13. Jahr hunderts, von Pierre Garrigou Grandchamp

Die Reste des Herrenhauses der Herren von Harcourt, unmittelbar südlich des Thermen palastes gelegen, wurden 1852 anlässlich des Durchbruchs der Rue des Écoles entdeckt. Nach der sorgfältigen Bauaufnahme durch Théodore Vacquer wurden sie noch im selben Jahr gnadenlos zerstört. Die Tafeln, die dieser für die „Statistique monumentale de Paris“ von Alexandre Lenoir vorbereitet hatte, blieben unpubliziert und das Gebäude fiel ab dem Ende des 19. Jahrhunderts dem Vergessen anheim. Ein aufmerksames Studium der Entwürfe für diese Bauaufnahme und der ältesten Stadtpläne von Paris sowie eine erneute Durchsicht der Quellen ermöglichten eine Rekonstruktion der Gesamtanlage des Herrenhauses, eine detaillierte Schilderung seines Hauptgebäudes mit dem großen Saal, und einen Datierungs vorschlag nach 1256 und vor 1269, der sich auf die Identifikation der Wappen stützt. Die Gegenüberstellung dieser Erkenntnisse mit dem Formenstudium der Maßwerke der großen Fenster lassen die entschiedene Modernität dieses Bauwerks erkennen, dessen einzige zeitgenössische Vergleichspunkte sich im Werk von Pierre de Montreuil finden lassen. Das Hôtel d’Harcourt ist bis dato das einzige Herrenhaus eines Granden der Epoche Ludwigs des Heiligen, das sich in dieser Weise rekonstruieren lässt.

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